C’est tout naturellement que, perpétuation presque coutumière, le sanglier est chassé au chien courant, comme le sont traditionnellement les mammifères dans le sud et l’ouest de la France. Comme toute chasse au chien courant, elle ressemble en bien des points à la vénerie mais en combinant laisser-courre et chasseurs postés. Elle débute par « le pied » autre nom donné à l’action consistant à « faire le bois » que les plus avertis s’ingénient à accomplir tôt le matin, avant de rejoindre la cabane de chasse. Après le café, les participants à la battue se réunissent autour du président ou, selon l’organisation locale, du chef de battue. Les postés reçoivent les consignes de chasse et de sécurité, tandis qu’est défini le secteur où les piqueurs découpleront les rapprocheurs.
Le parcours nocturne des sangliers pouvant couvrir une distance de plusieurs kilomètres, le rapprocher dure parfois plusieurs heures. Le plaisir de tous n’en est que renforcé, tant le travail des chiens captive les amoureux de cette chasse. Très fins de nez, les chiens rapprocheurs démêlent les vieilles voies d’un sanglier passé au cœur de la nuit, plusieurs heures plutôt. Sans se préoccuper un instant des chevreuils, lièvres ou autres renards qui s’enfuient devant eux, ils remontent la piste jusqu’à la remise diurne des sangliers. Vient le lancer, moment de frénésie pour les hommes, comme pour la meute, mise à la voie à la suite des rapprocheurs. Comptant dix à quinze chiens, souvent hétérogène, elle se compose au gré de l’addition des limiers appartenant aux uns et aux autres. C’est la menée.
Les chiens utilisés sont généralement des bleus de Gascogne, gascon saintongeois, ariégeois, beagle-harrier, griffon bleu de Gascogne, nivernais ou vendéen mais aussi bruno du Jura et anglo-français de petite vènerie. Dans beaucoup de cas, les chiens ne sont pas de race mais issus de croisements ou de saillies échangées entre piqueurs possédant un chien aux qualités reconnues des pairs. On parle alors de briquets du pays. Guidés par la mélopée des récris de la meute, dont la mélodie échappe aux non avertis, les postés se portent au-devant de la chasse. Embarqués à bord de 4×4 ou de 4 L, plus ou moins adaptés aux chemins forestiers, ils tentent de se placer sur les parcours de fuite des sangliers, qui utilisent immuablement les mêmes coulées, au tracé dicté par la géographie des lieux et son relief.
Cette chasse requiert la maîtrise de territoires vastes. Un animal lancé sur une commune est souvent chassé par les chiens durant une bonne heure, traversant le territoire de deux ou trois autres communes. Elle est organisée sur la base d’ententes qui prévoient de poursuivre sur les territoires des équipes voisines, la chasse du sanglier levé sur son propre territoire. Il est utile de préciser que cette façon de chasser se satisfait de populations de sangliers en faible densité, ce qui encourage les chasseurs à contenir, autant que faire se peut, le niveau des populations. Alors que la plupart des pays d’Europe et notamment la France, sont confrontés à un développement des populations de sangliers qui paraît exponentiel et impossible à maîtriser, cette chasse au chien courant se révèle être d’une précieuse efficacité.
S’appuyant sur les coutumes de chasse locales, la gestion mise en place par la FDC garantit une pression de chasse conséquente, limite le regroupement des sangliers et permet de contenir la forte démographie de l’espèce.
Sportive, cette chasse est aussi collective. Elle se vit en équipes communales, qui réunissent propriétaires, agriculteurs et habitants du village autour de la chasse de ce gibier singulier. La venaison est partagée à l’issue de la chasse entre les participants à la chasse et les propriétaires non-chasseurs de la commune. Souvent, un repas est organisé après la chasse, pour se partager les abats du gibier lors d’une soirée conviviale. En fin de saison, la société communale organise un grand repas, « le banquet des chasseurs », auquel sont conviés chasseurs, propriétaires de terres et des bois, habitants de la commune et même touristes.